« Une seule étincelle de lumière divine suffit à illuminer les ténèbres de l’âme. » (Maître Eckhart)
Il existe six portes pour entrer possiblement dans le mystère de la Vie Spirituelle. Elles ne s’ouvrent pas toutes à la fois. Parfois une seule s’entrouvre, et cela suffit pour bouleverser une vie.
La première est celle du numineux, ce frisson qui traverse l’être lorsqu’il se sent face à plus grand que lui. Hildegarde de Bingen (1098-1179) le connaissait, lorsqu’elle voyait la viriditas briller dans chaque feuille. Saint François (1182-1226) l’a chanté dans le soleil et l’eau, dans la fraternité des créatures. Là, le spirituel n’est pas une idée : c’est une présence sacrée.
La deuxième porte est l’épiphanie. Une révélation soudaine, un instant où tout prend sens. Le Christ parlait de cette vérité simple : « Dieu est Esprit, et ceux qui l’adorent, qu’ils l’adorent en esprit et en vérité. » Le spirituel surgit comme un visage qui se tourne vers vous, comme une lumière dans la nuit.
La troisième est la synchronicité de C. G. Jung (1875-1961). Ces coïncidences signifiantes qui semblent écrire un langage secret. Ces événements qui répondent à une question toute récente. Rudolf Steiner (1861- 1925) disait que le spirituel tisse des fils invisibles entre les événements. Christian Bobin (1951-2022) souriait : « Il n’y a pas de hasard, il n’y a que des rendez-vous. » La vie, parfois, répond à nos pas avec des signes tendres.
La quatrième porte est la mystique. C’est le feu intérieur de Victor Hugo (1802-1885) lorsqu’il parle à l’invisible, puisque les morts nous entendent encore. C’est l’art d’Omraam Mikhaël Aïvanhov (1900-1986), qui enseignait comment transformer la matière en lumière. C’est la spiritualisation de la matière de Teilhard de Chardin (1881-1955). Ici, l’âme se dilate, se fond, se livre à l’infini, dans une Unité, une Communion Universelle.
La cinquième porte est l’émerveillement esthétique ou existentiel. Regarder un enfant rire, une montagne s’ouvrir au matin, et sentir son cœur s’agrandir. Matthew Waldman (1970- ) voit le spirituel dans la beauté d’une ligne, dans la justesse d’un symbole. Bobin encore : l’infini qui se cache dans le fini.
La sixième enfin est celle du paranormal, les expériences aux frontières du connu. Viktor Frankl (1905-1997) en a fait une lecture sobre : même au plus bas, quelque chose en nous demeure intact, mystérieusement libre.
La science, aujourd’hui, enregistre ces récits d’expériences de mort imminente EMI, d’unité, d’amour inconditionnel, et constate qu’ils transforment durablement ceux qui les vivent.
Six portes. Six chemins. Tous mènent à la même Source. A l’Innommable.
Le spirituel n’est pas ailleurs que dans notre vie, dans ses plis ordinaires. Il n’est pas un luxe ni une fuite : il est cette lampe intérieure, fragile et invincible, qui nous permet de traverser la nuit.
« Le spirituel, c’est l’infini qui prend soin du fini. » (Christian Bobin)